mardi

Lecture : Le pouvoir 1962-1978 de M’Hamed Yousfi

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Le Quotidien d’Algérie, 13 octobre 1991
Belkaïd Akram


Que dire d’un ouvrage qui se veut celui d’un historien mais dont le contenu est d’un vide désespérant ? Quand donc les acteurs de la Guerre de libération et de la vie politique du pays qui décident de se mettre à écrire comprendront-ils que l’Algérien est las des règlements de compte et des procès d’intention mais qu’il attend plutôt des informations véridiques et des réponses concernant des événements qui conditionnent sa vie d’aujourd’hui. Le fait est, hélas, que le livre de M’Hamed Yousfi (*) n’apporte aucune lueur sur un passé récent dont certains voudraient qu’il soit bétonné à jamais.

Délaissant la rigueur nécessaire à l’historien, l’auteur s’est borné à énumérer pêle-mêle quantité d’anecdotes qui, d’ailleurs, sont pour la plupart connues tout en n’approfondissant jamais les idées présentées. Ainsi sont passées sous silence les véritables raisons de la crise de l’été 1962 alors qu’une argumentation fallacieuse donne son absolution à l’instauration du parti unique. Qu’il s’agisse de la Guerre des sables, du coup d’Etat de 1965 ou de la crise du Sahara occidental de 1976, l’anecdotique prendra toujours le pas sur l’argumentation, l’analyse et surtout l’objectivité. Une objectivité qui se laisse peu à peu, au fil de l’ouvrage, submerger par un sentiment anti-boumedieniste évident auquel s’oppose un pro-benbellisme qui se veut critique.

« Le pouvoir 1962-1978 » se divise en plusieurs parties plus ou moins cohérentes entre elles qui s’achèvent par la présentation de documents officiels telle la déclaration de novembre 1954 ou un condensé indigeste de la Charte nationale. Mais chaque livre a son intérêt et celui de M’Hamed Yousfi, qui nous a habitué à mieux, possède au moins le mérite de présenter plusieurs documents photographiques inédits qui, à eux seuls, valent le détour. Témoin cette photo en couverture, vraisemblablement prise lors d’un défilé, où se côtoient Ahmed Ben Bella et Houari Boumediene. Une couverture qui attirera de manière systématique le regard du client. Une astuce que nos marchands de légumes connaissent bien. Le fardage est une bien vilaine chose et ni un titre accrocheur ni une belle photo ne remplaceront jamais un écrit rigoureux et bien organisé.

Belkaïd Akram

(*) M’hamed Yousfi, Le Pouvoir 1962-1978, édité à compte d’auteur.
L’auteur : M’Hamed Yousfi a été tour à tour membre du Comité central du Parti du peuple algérien (PPA-MTLD) et de l’Etat-major de l’Organisation secrète (OS) avant d’être membre politico-militaire de la Wilaya V avec pour responsabilité l’armement et la logistique. A l’indépendance, il est nommé directeur général de la Sûreté nationale puis Ambassadeur d’Algérie en Suisse.

PS : Cet article fut entaché d’une bien vilaine coquille dans la présentation de l’auteur ce qui obligea Le Quotidien d’Algérie à publier le rectificatif suivant :

« Dans la fiche de lecture, consacrée à l’ouvrage de M’Hamed Yousfi : ‘Le pouvoir 1962-1978’, une malencontreuse erreur de frappe a présenté l’auteur comme étant membre de l’OAS. En fait, il s’agit de l’OS (Organisation spéciale). Les lecteurs auront rectifié d’eux-mêmes. Quant à nous, nous présentons nos excuses à l’auteur. [signé] Rubrique culturelle.»
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lundi

Alger, capitale des hommes de peine maliens

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Emigration de troisième type

Le Quotidien d’Algérie, 12 octobre 1991
Belkaïd Akram

La France a ses femmes de ménage portugaises. Aux Etats-Unis, on s’arrache les boys philippins et l’Algérie, du moins Alger, a désormais ses domestiques maliens. L’on savait depuis peu que plusieurs filières clandestines déversaient sur la capitale un lot important d’Africains fuyant les conditions difficiles de leur pays et destinés surtout à être employés comme manœuvres non déclarés sur les chantiers du bâtiment. Mauvais traitements, situation précaire sont toujours et encore le lot quotidien de ces travailleurs immigrés d’un nouveau type dont la majorité se recrute au square Port-Saïd. L’opinion algérienne ignore pourtant que de nombreux Maliens sont embauchés en tant qu’hommes à tout faire dans les familles bourgeoises d’Alger.

Omar a vingt-six ans. Il vient du Quartier du Soleil, un faubourg misérable de Bamako. L’itinéraire habituel. Chômage, misère, envie de partir. Au départ, quelques délits. La combine, l’argent. Arrive l’aventure. Première étape à Tamanrasset. Ville gouffre, ville effroi où les étrangers du Sud sont régulièrement refoulés ou parqués dans des camps humanitaires. Un contact, beaucoup de billets et le voici à Alger au nez et à la barbe de la gendarmerie. Petits emplois, un peu partout. Tour à tour, gardien de nuit, jardinier, plongeur dans un restaurant de Riadh el-Feth, il a fini par être employé par un homme d’affaires d’Hydra : « Il m’a proposé trois mille dinars, soit deux fois le salaire que je touchais au restaurant avec en plus la nourriture et le toit. Ici je suis à l’abri même si je n’ai pas le droit de sortir. Et puis je tremble à l’idée de me faire contrôler par la police. Le patron est correct. » Correct ! Près de quatorze heures de travail par jour. Poussière, par terre à faire, nettoyages en tout genre, corvées de cuisine interminables.
« Au bout d’un moment, sa femme ne me supportait plus. Elle disait que je sentais mauvais et que je volais. En fait, c’est parce que j’étais de plus en plus fatigué et que je travaillais moins bien. On m’a donc ‘donné’ à leur ami avocat chez qui je suis encore aujourd’hui. On me traite mieux, on essaie même de m’apprendre à lire. Le travail est toujours aussi dur mais je ne peux rêver mieux. »

Gêne ? Mauvaise conscience ? Les familles algériennes qui emploient ces domestiques évitent d’en parler en dehors du cercle restreint de leurs relations. Leïla est ingénieur. Sentiments humanistes et éternel militantisme de salon. « J’avoue avoir un peu honte lorsque des amis viennent à la maison. Ils sont à la fois choqués et amusés et cela devient vite un sujet de plaisanterie. Des fois, je me rassure en me disant que nous le sauvons de la misère, une façon d’oublier qu’il y a quand même une exploitation. »

Des clandestins sans papiers ni protections. Un immense vivier pour la néo-bourgeoisie algéroise. Arrivistes, peut-être, mais parfois hélas, cadres de l’Etat et fonctions libérales. Le Malien ne peut rien faire. Aucune plainte n’est possible ou permise. Une marge de manœuvre très étroite. Moussa, trente ans. En Algérie depuis six ans et homme de ménages depuis peu. « J’ai beaucoup espéré de mon départ du Mali. Je voulais rejoindre la France. L’Algérie ne devait être qu’une étape. Mais les choses ne sont jamais simples. Il me faut encore deux ou trois années de travail avant d’avoir un peu d’argent pour Paris. En attendant, je nettoie et je fais la cuisine. Au début, la patronne vérifiait toujours si je m’étais lavé les mains avant de faire n’importe quelle tâche ménagère. » Amertume et résignation. L’Algérien pour lui n’est pas vraiment méchant mais il est loin d’avoir le cœur sur la main. « Tous sont plus ou moins racistes, même les gamins. Surtout les gamins. » Dans ses paroles, aucun signe d’espoir de retour au pays. « Pourquoi faire ? Ici, je gagne ma vie. C’est l’essentiel. » Racistes les Algérois ? Exploiteurs ? Aucun ne dira le contraire. Omar va même plus loin, égratignant au passage la sacro-sainte solidarité musulmane. « Un jour, j’ai voulu aller à la mosquée. Je suis un musulman qui a toujours pratiqué. On ne m’a pas ouvert les bras. Personne ne l’a fait. On m’a regardé avec curiosité mais sans plus. Certains m’ont même fait comprendre que je devais me tenir au fond de la salle de prière. Je n’y suis plus retourné. »

Le phénomène se répand. Maliens, Nigériens et même Camerounais. Villa d’Hydra, d’El Biar ou d’ailleurs. Triste société qui hier s’émancipait dans le sang et qui aujourd’hui asservit l’autre, l’étranger. D.K., sociologue, ne partage pas vraiment cet avis. « Ce type de comportement est inscrit dans nos traditions. Au Sud ou même à l’Ouest, les grandes familles avaient des esclaves et aujourd’hui encore se perpétuent, même sous d’autres formes, ces relations de servilité. »
L’homme de la rue reste sceptique mais, au fond, rien ne l’étonne. Caprices de riches qui ne savent plus quoi inventer, arrivisme insupportable qui fait honte au pays…

Vendredi. Le square Port-Saïd. Des dizaines de futurs domestiques ou manœuvres attendent. Indifférence générale, parfois quelques quolibets. Poignant spectacle qui n’est que l’arbre qui cache la forêt. Que penser vraiment de cette famille des hauteurs d’Alger qui emploie trois Maliens à temps plein dont le service est toujours assuré en gants blancs ! Cliché de mauvais goût. Qui sait, il viendra peut-être un temps où le marché aux esclaves géré hier par les corsaires turcs au XIXème siècle renaîtra de ses cendres pour le plus grand bonheur de la noblesse algérienne.

Belkaïd Akram
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L’opposition en Algérie depuis 1962 (PRS-CNDR et FFS) de Ramdane Redjalla

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Le Quotidien d’Algérie, 10 octobre 1991

La vie politique algérienne est de plus en plus mouvementée et le rythme auquel est soumise l’opinion depuis octobre 1988 a occulté certains grands événements qui s’enfouissent peu à peu dans les mémoires sans pour autant que la vérité ne soit connue. L’ouverture du pays n’a donc pas délié les langues même si de nombreux écrits ont été publiés par des personnalités apportant pour chacune d’elles un témoignage dont le contenu est souvent édulcoré voire même autocensuré s’il n’est pas teinté de subjectivité. A cela une simple raison. Ces hommes politiques d’hier le sont encore aujourd’hui avec tout ce que cela implique au point de vue stratégie électorale.

L’ouvrage de Ramdane Redjalla publié une première fois par les éditions de L’Harmattan (Paris) puis, aujourd’hui, par les éditions Rahma d’Alger, peut de ce fait être écarté du lot car écrit par un homme qui se situe en dehors de l’arène algérienne et qui tente tout au long de son livre de fournir un travail d’historien indépendant de tout clivage. L’on pourra toutefois objecter que Redjalla est juge et partie car ayant été tour à tour militant du PRS-CNDR de Boudiaf et du FFS d'Aït-Ahmed.

« L’opposition depuis 1962 » se divise en trois grandes parties distinctes. La première est une « étude sur l’origine et le comportement des partis d’opposition depuis 1962 ». L’auteur n’ira pas par quatre chemins, égratignant au passage des leaders comme Ben Bella et surtout Aït-Ahmed. Il y est ainsi fait mention de « l’instabilité politique et idéologique » de ce dernier ainsi que « du pouvoir sans partage de Ben Bella qui selon la conjoncture a favorisé l’aspect islamique ou laïc ». Mais, plus que tout, l’intérêt de cette partie réside dans la chronologie minutieuse que Redjalla présente au sujet de la crise de l’été 1962, éclairant sous un jour nouveau les événements qui ont amené la victoire du bloc de Tlemcen avec l’énumération des alliances et des voltefaces qui influeront directement sur la vie future du pays. Pour l’auteur, la chose est claire, il n’y a eu aucun fondement d’ordre politique motivant l’apparition des tendances au cours de cette crise ni même par la suite lorsque des mouvements d’opposition à Boumediene et Ben Bella ont commencé à activer. Conflits d’hommes donc et non pas d’idées pour Redjalla qui apporte un soin particulier à l’explication du pourquoi de l’instauration du parti unique et de l’échec des premières élections législatives du pays. On ne manquera pas d’ailleurs de faire un parallèle entre ces élections et celles qui se préparent aujourd’hui.

La seconde partie concerne l’historique du premier parti d’opposition qui est apparu après l’indépendance à savoir le PRS-CNDR. L’auteur y fournit une somme importante d’informations et de documents tout en insistant sur « la ligne instable de ce parti » qui finira par s’auto-dissoudre au début des années 1980. Suit une troisième partie qui concerne le FFS et qui apporte une foule de jugements à l’encontre de Hocine Aït-Ahmed en se basant pour cela sur l’attitude de ce dernier lors des événements qui ont marqué l’Algérie depuis 1962. Citons pour l’exemple la tentative de putsch de Zbiri et les diverses négociations avec le régime de Boumediene.

Un livre qui risque donc de soulever quelques polémiques mais dont l’intérêt est plus que certain puisqu’il permettra au lecteur algérien d’avoir une meilleure appréciation de l’histoire de l’opposition en Algérie. Une histoire confondue avec celle de quelques leaders directement interpellés par cet ouvrage.

Belkaïd Akram

 
(*) L’opposition en Algérie depuis 1962. Le PRS-CNDR, le FFS. Ramdane Redjalla. Editions Rahma. Alger.
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Les contradictions de l’Amérique

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Le Quotidien d’Algérie, 3 novembre 1991

Clarence Thomas a donc fini par gagner son combat. Le juge candidat à la Cour suprême n’a pas été jugé indigne de son futur poste par la commission sénatoriale chargée d’enquêter sur ce qui convient d’appeler aujourd’hui « l’affaire Anita Hill ». Cette triste affaire médiatique  - où deux Noirs ayant réussi mais issus tous deux d’un milieu modeste de Géorgie se sont donnés en spectacle, à la grande satisfaction des blancs conservateurs mais aussi, hélas, de certains démocrates – montre combien la société américaine est malade car elle résume à elle seule tous les maux principaux dont elle souffre. La liaison démocratie-média semble de plus en plus mise à mal par ce fameux cinquième amendement qui garantit la liberté d’expression.

Comment peut-on accepter, même sous couvert de justice, et de recherche de la vérité, que la vie privée d’un homme soit fouillée en public et que surtout les débats et auditions de la commission d’enquête aient été diffusés en direct comme un vulgaire match de football ? Partout aux Etats-Unis et plus qu’ailleurs, l’image, le son ou l’écrit se doivent de donner dans le démesuré et le sensationnel, sacrifiant le fond pour le superficiel. Le phénomène est devenu si important que certains chercheurs du pays parlent de paupérisation culturelle de l’Américain moyen qui absorbe aujourd’hui le menu léger qu’on lui sert sans chercher à comprendre ou à analyser. De fait, aucun des problèmes majeurs auxquels est soumise l’Amérique n’est réellement traité en profondeur par la presse qui leur substitue en général une quantité incroyable de faits-divers, les transformant en véritables affaires d’Etat comme ce fut le cas pour le juge Thomas.

D’autre part, qui avait vraiment besoin de savoir quelle était la marque de parfum que ce dernier avait offert à sa secrétaire et même, osons le dire, s’il est réellement coupable de harcèlement sexuel ? Car si ce problème semble prendre de plus en plus d’importance, il n’y a pas mieux que cette affaire pour jeter le trouble et cacher la réelle situation de la condition féminine dans un pays en permanence écartelé entre libéralisme et un puritanisme des plus rigides. Un pays qui se dit être celui des libertés et où l’on constate le recul des mouvements féministes que l’on cantonne désormais dans l’insolite voire même l’extravagant. Parler du seul harcèlement sexuel, c’est occulter qu’il y a plus de chômeurs ou de femmes travaillant clandestinement que d’hommes dans la même situation. C’est oublier aussi ou vouloir faire oublier que des milieux d’extrême-droite pèsent de tout leur poids pour arriver à faire voter des lois de plus en plus sévères vis-à-vis de l’avortement, des filles-mères ou des divorcées. Insister sur le fait que l’on se permette de remettre en cause la nomination d’un juge en raison d’une telle affaire c’est vouloir faire croire qu’il existe un lobby féministe très puissant aux USA alors qu’à diplômes égaux une femme n’a que dix pour cent de chances d’obtenir un avancement contre quatre-vingt-dix pour un collègue masculin.

Mais si l’on revient au fond de cette affaire, il est évident que le racisme est loin d’être exclu et que la conclusion du débat est de celles qui noient le poisson en voulant amener à penser que la justice est toujours rendue que l’on soit blanc ou noir. Des Noirs dont la population est la véritable victime de ce psychodrame car n’ayant rien trouvé de mieux que de fixer son attention et sa colère sur le dossier « Anita Hill » oubliant sa propre situation faite de chômage et de misère et donnant son soutien à un homme dont les positions conservatrices – n’est-il pas l’un des proches du Président Bush ? – ont de quoi choquer lorsqu’elles concernent l’Irak, l’avortement ou le Tiers-monde. Venu d’un monde dont il ne fait désormais plus partie Clarence Thomas a su trouver les mots en parlant de lynchage médiatique pour rallier à lui une bonne partie des citoyens de couleur. L’homme est aujourd’hui à la Cour suprême mais de ceux qui ont été avec lui, trente pour cent vivent en dessous du seuil de pauvreté. Comment oublier ou masquer le fait qu’un homme noir vivant dans une grande ville a moins de chances d’atteindre l’âge de soixante ans qu’un habitant du Bangladesh ? On comprend ainsi que la levée des suspicions sur Clarence Thomas relève plus de la poudre aux yeux que d’un quelconque geste de clémence et que cela ne saurait masquer aux yeux du monde la tragique situation de la population noire américaine.

Belkaïd Akram

 

 

Jordanie : Position délicate

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Le Quotidien d’Algérie, 4 octobre 2011

La Jordanie a depuis plus de vingt années régulièrement traversé des phases difficiles, coincée entre des courants totalement antagonistes qui ont souvent mis à rude épreuve son équilibre socio-politique. L’on se souvient de l’embrasement du début des années 1970, le « septembre noir » des Palestiniens, de la réaction violente du royaume hachémite et des risques de guerre civile qui avaient suivi la décision de ce dernier de ne pas participer au conflit israélo-arabe.

A chacun de ces événements s’étaient manifestées deux ou plusieurs tendances qui donnaient à croire aux observateurs qu’aucune solution pacifique ne pouvait être trouvée. Derniers exemples en date, la position inconfortable de ce pays lors du conflit Irak-Iran où Amman avait donné tout son soutien à Baghdad malgré la colère des Ayatollahs avec tout ce que cela peut représenter comme menaces internes. Un soutien renouvelé pendant la Guerre du Golfe malgré, cette fois-ci, les pressions et représailles des Etats-Unis et d’Israël. La Jordanie a ainsi toujours su se tirer d’affaire au moindre prix et cela au grand étonnement des cassandres qui annonçaient déjà sa disparition.

A l’origine de cette facilité d’adaptation, le roi Hussein, véritable stratège et spécialiste du compromis. La conjoncture actuelle du pays est une nouvelle occasion pour le souverain hachémite d'utiliser son talent de rassembleur. Il a ainsi su maîtriser, pour un temps au moins, la montée islamiste en ouvrant aux religieux la vie politique qui les a amenés à siéger au Parlement et à obtenir des postes ministériels. En adoptant une démarche un peu plus religieuse, en se posant comme l’authentique gardien des lieux sacrés, il a réussi à s’élever au-dessus de la mêlée et à faire taire les dissensions politiques qui apparaissent de plus en plus dans une société durement marquée par la crise économique et où le fossé entre riches et pauvres ne cesse de s’élargir.

La future et toujours incertaine conférence de paix sur le Proche-Orient a constitué l’autre domaine d’intervention du roi auquel il a fallu énormément de poids pour amener le gouvernement de son Premier ministre, Taher Masri, à accepter en premier lieu le principe d’une rencontre avec Israël mais surtout la formation d’une délégation palestino-jordanienne contrairement aux vœux de certains responsables qui souhaitaient que deux délégations distinctes se présentent à la conférence. Mais plus que tout, il aura fallu à Hussein plusieurs semaines pour convaincre l’opinion que la conférence ne serait en rien cette future défaite de l’OLP que prédisent certains milieux politiques, témoin le récent remaniement ministériel qui a vu la formation d’un universitaire à la tête des Affaires étrangères. C’est pourtant là une grande prise de risque pour le roi car il porterait une bien lourde responsabilité en cas d’échec des négociations. Le Jordanien, qu’il soit d’origine palestinienne ou non, ne comprendrait pas cette nouvelle concession « gratuite » à l’Etat d’Israël.
 
Belkaïd Akram

 


 

 

samedi

Panorama lecture

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Le Quotidien d’Algérie, 31 octobre 1991

Le livre est cher mais l’envie de lire existe encore. Ce constat, mi-figue mi-raisin, ne doit pas décourager ceux qui continuent à fréquenter les librairies et à qui nous offrons désormais chaque semaine, le maximum d’informations sur ce qui s’édite et se vend en Algérie – étant inutile de parler des publications de l’étranger (même celles des auteurs algériens) à moins de vouloir augmenter la frustration des adeptes de la lecture.

Enfants

- Abécédaire en arabe
Un abécédaire en arabe et avec illustrations, telle est la dernière parution des éditions Saphir. Un ouvrage de bonne qualité avec de belles illustrations et une sélection de couleurs appréciable. Un livre destiné en premier lieu aux jeunes enfants des deux premières classes primaires, voire même de la maternelle. Notons aussi le prix tout à fait abordable de cet abécédaire ce qui ne sera pas fait pour déplaire aux parents.
Min Alif ila yâ (abécédaire), Editions Saphir, Bordj El Kiffan, prix public généralement constaté : 40 DA.

Jeunes

- La Guerre du feu
Un roman d’aventures palpitantes dans un monde aussi étranger que dangereux. L’être humain vient à peine de sortir du monde animal. La préhistoire, la lutte avec les bêtes sauvages et surtout la lutte pour la conquête du feu, indispensable contre la faim, le froid et la peur. Ce livre ravira les amateurs de mystère et d’évasion.
La Guerre du feu, Joseph H. Rosny, collections Anis-Jeunes, Enag. Prix : 25 DA.

Divers

- La Guerre du Golfe
Une autre guerre, cette fois-ci. Le livre de Pierre Salinger reste toujours d’actualité malgré le fait qu’il a paru il y a près d’un an. Pour les amateurs d’histoires au présent.
La Guerre du Golfe, P. Salinger et E. Laurent, Editions Rahma/Khezna

- La Guerre d’Algérie
Notre guerre vue par Patrick Eveno et Jean Planchais, qui ont réunis dans leur ouvrage une série impressionnante de témoignages constituant l’un des meilleurs dossiers traitant du sujet. Un livre à posséder.
La Guerre d’Algérie, Patrick Eveno et Jean Planchais, Editions Laphomic.

Belkaïd Akram

 

 

vendredi

Coups d’éventails sanglants

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Le Quotidien d’Algérie, 30 octobre 1991

Il est des coïncidences à travers le monde qui ne semblent étonner personne. Des coïncidences qui créent l’événement ou qui influent directement sur lui et on ne cherche jamais, ou si peu, à en connaître les véritables raisons. L’on se souvient de ce mois de juin 1982 où l’attentat contre l’ambassadeur israélien à Madrid devait servir de prétexte à la future guerre du Liban.

Accuser le gouvernement sioniste, par Mossad interposé, d’avoir organisé ou provoqué ce meurtre était alors impensable et même les médias arabes n’osent toujours pas avancer cette hypothèse.

Et voilà qu’aujourd’hui, à l’heure de la Conférence internationale sur le Proche-Orient attire la plus grande des attentions, l’on apprend que neuf colons ont été blessés. Et la presse occidentale de se déchaîner en un unanime concert d’indignation. Un véritable matraquage qui amènera monsieur tout le monde à se demander si les Palestiniens en valent vraiment la peine.

Shamir et ses amis peuvent dormir tranquilles, l’opinion publique mondiale est de plus en plus préparée et nul ne s’étonnera du fait qu’Israël ne cèdera rien. La stratégie du coup d’éventail est connue mais force est de constater qu’il en est d’autres plus sanglantes que les autres.

Belkaïd Akram

dimanche

Larbi Ben M'hidi, l'homme des grands rendez-vous

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Le Quotidien d’Algérie, 24 octobre 1991

Les biographies ou les témoignages sur les héros de la Révolution restent rares surtout lorsqu’ils concernent des personnages disparus et dont l’histoire officielle reste d’une pauvreté affligeante. L’Algérien ne sait pas grand-chose de Zabana ou de Didouche Mourade. Nom de rues, clichés, stéréotypes et rien d’autre.

Le livre d’El-Hachemi Trodi (*) est une initiative importante car malgré ses faiblesses, il est d’un apport important sur la connaissance de Larbi Ben M’hidi, grand militant de la cause algérienne, et dont la majorité ne « connaît » que sa triste fin durant la Bataille d’Alger.
L’ouvrage, disons-le d’emblée, ne répondra pas à toute la curiosité du lecteur car retraçant simplement les périodes où l’auteur était proche de Ben M’hidi. Enfance difficile, premiers pas de militant au sein des Scouts musulmans (SMA) ou des Amis du Manifeste (AML). On découvrira ainsi que « Ben M’hidi n’a jamais été l’élève de Ben Badis comme certains essayent de le faire croire aujourd’hui ».

D’autres informations y sont présentées sous la forme de thèmes qui ont un jour où l’autre passionné le leader algérien. « Ben M’hidi et le sport », « Ben M’hidi et le théâtre » ( !) et, pour terminer dans un tout autre registre, « Ben M’hidi clandestin à Alger au début des années 1950 ».

Mais l’on regrettera de ne rien savoir du Ben M’hidi de l’Oranie et de la zone autonome d’Alger qui, de l’aveu même de l’auteur correspond à une période où leur deux routes avaient divergé. Reconnaissons tout de même à Trodi la qualité de son travail d’archivage sur ces périodes ainsi que le nombre d’informations relatives aux rapports entre les divers partis politiques algériens d’avant 1954 (PCA, PPA-MTLD,…).

Un livre témoignage que l’on consultera avec intérêt, et dont on espère qu’il suscitera d’autres vocations de biographes-historiens.

Belkaïd Akram

(*) Enag Editions – Collection témoignages.
Prix : 73 DA
L’auteur : El-Hachemi Trodi, compagnon de route de Larbi Ben M’hidi et militant du PPA clandestin, du MTLD, de l’Organisation secrète de l’OCFLN.
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jeudi

Brèves aéronautiques

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Le Quotidien d’Algérie, 24 octobre 1991
 
- En 1990, près de 300 collisions entre avions ont eu lieu au sol sur la piste ou sur l’aire de parking. Soixante (60) ont pour raison la défaillance de l’avion lui-même (perte du système de freinage par exemple) alors que près de cent sont liées à une erreur des contrôleurs aériens qui ont souvent le défaut de ne s’intéresser à l’avion qu’une fois à la limite du décollage. Mais le record reste attribué aux pilotes qui sont responsables de près de cent quarante incidents au sol dont les plus récents ont eu lieu à Londres et à Atlanta.
- C’est en Jordanie que l’Irak avait parqué sa flotte civile peu avant le début de la Guerre du Golfe. Les appareils d’Iraqui Airways sont toujours à Amman en attendant que ne soit décidée la levée de l’embargo sur le ciel irakien.
- Le pourcentage mondial de retard avant le décollage a augmenté de manière importante affectant aujourd’hui près de 30% des vols pour une durée moyenne de 15 minutes.
- Il semblerait que la Libye cherche à tout prix le moyen de rompre ou de détourner l’embargo US qui l’empêche de renouveler sa flotte aérienne vieille aujourd’hui de vingt ans. On sait aussi que de nombreux contacts ont lieu avec Air-Algérie et Royal Air Maroc pour finaliser enfin le projet d’Air Maghreb, future compagnie de charters maghrébins.
- Encore un embargo, mais cette fois-ci au détriment de l’Iran dont les USA empêchent l’achat de petits avions de transport civil de British Aerospace BAE 146. Une décision qui surprend lorsque l’on sait qu’un an auparavant, l’administration Bush avait autorisé la livraison de 12 Fokkers 100 qui sont des avions de transport civil de moyenne envergure.

Belkaïd Akram

lundi

Chronique internationale : Palestine (Conférence de Madrid)

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Le Quotidien d’Algérie, 23 octobre 1991

Suivre le menteur jusqu’à sa porte, tel semble être le crédo de la délégation palestinienne qui ira aux négociations de la Conférence de la paix organisée à Madrid. C’est en effet, sans aucune conviction que les Arabes, Palestiniens et Jordaniens en tête, ont accepté la rencontre avec les Israéliens. L’observateur non averti a le droit d’être surpris. Voilà une conférence dont on parle depuis des années, réclamées à corps et à cris par tous les démocrates de la terre et qui, grand paradoxe, ne soulève aucun enthousiasme tant on se doute du résultat final. A cela, plusieurs raisons :

La première concerne le pourquoi, ou plutôt l’origine politique de la future rencontre. Retour en arrière de quelques mois. La Guerre du Golfe et ses néologismes. Le nouvel ordre international et cette incessante ritournelle servie par les USA : « Désormais, la justice sera ». Où trouver meilleure justification à l’agression contre l’Irak ? Une arme à double tranchant puisque l’administration Bush devait montrer que ce nouvel ordre n’était pas celui des deux poids et deux mesures. Et si le Koweït venait à être libéré, le Liban ou la Palestine, ne devaient pas être oubliés.

Et c’est là que réside l’explication de l’acharnement de James Baker, à amener les deux camps ennemis à s’asseoir à la même table. Reconnaissons au moins à l’Amérique, la valeur de son initiative, valeur résidant en grande partie dans sa fermeté vis-à-vis du gouvernement Shamir qui a tout fait pour se dérober. Une fermeté qui n’en est pas moins inoffensive dans la mesure où elle n’a aucune conséquence sur la position d’Israël. Et là réside la seconde raison qui motive le peu d’optimisme par rapport à la Conférence et la stratégie de l’Etat sioniste : d’un côté, une délégation qui attend (espère ?) non seulement un pas vers la récupération des territoires occupés sinon la création d’un Etat palestinien et de l’autre, un bloc de mauvaise foi totale qui annonce que les discussions sur la paix, concept très vaste et nébuleux, ne doivent souffrir d’aucun préalable et qu’il n’est surtout pas question de parler de restitution de Ghaza et de la Cisjordanie.

Il apparaît ainsi clairement qu’il se prépare un simulacre de négociations dont on voudrait faire croire qu’elles sont le rendez-vous du siècle et qui risquent de n’être qu’une triste cacophonie politique sur fond de dialogue de sourds. Et force est donc de constater que cette conférence est organisée parce qu’elle devrait l’être au regard de l’opinion mondiale et que les risques qu’elle présente pour les Palestiniens sont énormes. Loin de nous l’envier de jeter la pierre aux participants arabes. Un refus aurait été suicidaire, son exploitation médiatique détruisant l’image du rameau d’olivier jadis brandi par Yasser Arafat. Un Arafat dont on n’arrive pas vraiment à accepter que son organisation ne soit pas représentée. Et l’on se demande si tout cela a un sens et si une lueur est vraiment susceptible d’apparaître.

Cela d’autant plus que la droite israélienne a, d’ores et déjà, décidé de pratiquer la surenchère de manière à torpiller la conférence. Qu’il s’agisse des fondamentalistes religieux ou du ministre de l’habitat, Ariel Sharon (responsable du massacre de Sabra et Shatilla), tout converge vers le même temps. Poursuite des implantations dans les Territoires occupés et appel à de nouvelles élections législatives pour faire chuter le gouvernement actuel et priver les Palestiniens d’un interlocuteur officiel. Mais ces gesticulations israélo-israéliennes font vraisemblablement partie d’une même ligne de comportement héritée de Golda Meir ou Begin qui consiste à exiger sans avoir rien à offrir.

Une stratégie qui sera appliquée de manière systématique vis-à-vis de la délégation jordano-palestinienne mais qui risque d’être un peu plus flexible par rapport à la Syrie. Les craintes d’une initiative syrienne au détriment de la cause palestinienne sont en effet, sérieusemnt prises en compte car, il semble que la restitution réelle du plateau du Golan soit une concession israélienne possible. Une concession qui pourrait pleinement satisfaire la Syrie sans pour autant que la restitution des Territoires occupés ne soit envisagée. Un risque qui existe comme en témoigne la visite éclair effectuée par Yasser Arafat à Damas. Une visite qui cherche à resserrer des liens biens distendus par le temps et les conflits passés.

Belkaïd Akram
  

Chronique internationale : Tunisie

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Le Quotidien d’Algérie, 21 octobre 1991
 
La récente décision prise par le président Benali de ne pas gracier les trois condamnés à mort appartenant à la mouvance islamiste prouve à souhait que le gouvernement tunisien entend ne céder ni aux pressions ni à la violence. Mais, plus que tout, c’est une nouvelle étape qui a été franchie dans la lutte, désormais sans merci, entre autorités et mouvements intégristes. Pour l’heure, l’avantage semble être du côté du pouvoir en place. Emprisonnés ou en exil, obligés de vivre dans la clandestinité, les militants d’Ennahdha adoptent un profil bas, laissant passer la tornade des arrestations consécutives à la découverte d’un complot contre le président Benali. Les détails concernant la préparation de l’attentat ont, semble-t-il tout autant ému l’opinion publique que lorsque les locaux du RCD (parti au pouvoir) avaient été incendiés en février dernier, incendie au cours duquel, rappelons-le, un gardien avait été brulé vif. C’est d’ailleurs cet acte condamnable qui a valu la peine de mort aux islamistes. De nombreuses manifestations de soutien ont donc été organisées à travers tout le pays et la quasi-totalité des partis politiques d’opposition ont fait bloc derrière le président.

Une unanimité totale mais qui n’en reste pas moins sans grand impact sur la vie réelle de la société. Car, à l’image des autres nations maghrébines, voire même arabes, la Tunisie traverse l’une des plus difficiles périodes depuis son indépendance. Régression de l’agriculture, baisse des réserves hydrauliques, problèmes énergétiques et chutes des revenus liés au tourisme (Guerre du Golfe oblige !) sont autant de poids qui font craquer le pays de toutes parts, lézardant ainsi un édifice que Bourguiba avait de son temps réussi tant bien que mal à stabiliser. De nombreuses voix commencent à s’élever en dehors de l’activisme religieux, pour dénoncer pêle-mêle la bureaucratie régnante, les inégalités sociales et la cherté de la vie. Au milieu estudiantin, éternel contestataire, s’ajoute la grogne des travailleurs agricoles et d’une bonne partie de la classe moyenne désireuse d’améliorer son train de vie.

Cette perte du pouvoir d’achat, les abus constatés ça et là font que la Tunisie vit sur une poudrière même si l’explosion ne peut-être envisagée qu’à longue échéance. Encore faudrait-il que s’installe une véritable ouverture démocratique réclamée sans cesse par la ligue locale des droits de l’homme. Il appartient donc au gouvernement Benali de démocratiser. D’ouvrir afin de prendre de vitesse tous les types d’activisme. C’est là un scénario presque dicté par la logique que nous Algériens connaissons bien. Il est d’ailleurs intéressant de remarquer que nos deux pays font l’objet d’une attention particulière de la part d’observateurs étrangers, notamment d’Europe du Sud, pour qui en règle générale, l’islamisme est un danger. Tous, en fait, attendent de savoir laquelle des deux politiques sera payante. En premier lieu, l’ouverture démocratique totale, du moins officielle, avec autorisation des partis politiques islamiques (cas de l’Algérie qui a donné son agrément au FIS et cela au grand dam de la Tunisie). La seconde alternative consistant quant à elle à adopter la stratégie qui a toujours été celle de Bourguiba et que Benali a reprise à son compte, semble-t-il de manière forcée comme en témoigne ses gestes de clémence (à l’égard des islamistes) à son arrivée au pouvoir. Aucun dialogue donc et guerre totale jusqu’à ce que, la croissance économique aidant, les problèmes sociaux disparaissent en grande partie vidant du même coup les rangs des islamistes.

Les démarches sont, on le voit, totalement différentes mais le risque à terme est exactement le même pour toutes les deux. Que le scénario catastrophe, récession-crise-chômage, se perpétue et le Maghreb, du moins l’Algérie et la Tunisie, risquent à nouveau d’avoir à payer le prix du sang et du feu.


Belkaïd Akram 
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Chronique internationale : Tibet

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Le Quotidien d’Algérie, 17 octobre 1991


Tibet. Capitale Lhassa. Pourquoi parler de ce pays alors que l’actualité semble si loin du toit du monde ? Simplement en raison d’une association d’idées liée à l’attribution du prix Nobel de la paix. Il y a deux ans en effet, le prestigieux lauréat avait été le Dalaï-Lama, véritable divinité vivante adorée par tout un peuple dont on connaît très peu la situation actuelle. Un peuple oublié, vivant une guerre oubliée.

C’est au début des années Cinquante que la Chine de Mao annonçait officiellement le « rattachement du territoire chinois du Tibet » à la république chinoise. Une nouvelle qui passa alors inaperçue et dont très peu s’émurent. Le contexte était alors à la guerre froide et le sort de quelques centaines de milliers de Tibétains ne pouvait souffrir la comparaison avec les grandes crises mondiales telles que l’affaire du Canal de Suez. Une résistance locale vit pourtant le jour. Celle des Khambas, cavaliers nomades qui réussirent à infliger quelques défaites à l’armée maoïste avant d’être submergés par le nombre et l’artillerie moderne. Depuis, une chape de plomb s’est abattue sur le pays. Aucune activité, qu’elle soit religieuse ou politique, n’est autorisée. Parfois, quelques émeutes qui, lorsqu’elles arrivent à durer, obligent les autorités chinoises à publier des commentaires laconiques sur les « contre-révolutionnaires du Tibet ».

Les observateurs avertis savent que la population n’est pas domptée, et le Dalaï-Lama, lui-même, ne se prive pas, dès lors qu’on lui en donne l’occasion, de parler et de dénoncer l’arbitraire. Les mouvements de contestation existent et existeront toujours. L’information arrive parfois au détour d’un touriste égaré ou d’un alpiniste sur place par hasard. Des confrères y ont même laissé leurs vies. Anonymement, loin de toute passion.

Mais pourquoi parler du Tibet alors que Palestine, Liban ou Afrique du Sud ? Tout simplement pour dire que le malheur d’un peuple n’est pas quantifiable. Que cette fin de siècle est celle des deux poids, deux mesures. Qu’ils soient Palestiniens, ou Indiens d’Amazonie, ceux qui souffrent n’ont vraiment que faire de l’attribution d’un prix Nobel tant les dés semblent truqués. L’évidence est là. Ne compter que sur soi-même, et cela est déjà beaucoup, telle semble être la seule alternative. Faillite des idéologies révolutionnaires, asservissement graduel de l’URSS, le bout du tunnel est encore loin pour tous les petits de la Terre.
 
Belkaïd Akram
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La nouvelle du jeudi : Le tueur fou de la rue du Levant

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Le Quotidien d’Algérie, 17 octobre 1991

La balle bleue m’a raté de peu. Des égratignures, un peu de sang et quelques cheveux brûlés. Une odeur qui me rappelle mon enfance. La rôtisserie de mon oncle. Les têtes de veaux farcies à la menthe et aux épices. Dieu seul sait depuis quand je n’ai pas mangé de viande. Le dernier rat est mort depuis bien longtemps, désintégré la nuit par un fusil à infrarouges…
La balle m’a raté mais il a quand même fait mouche. Hier encore, nous étions quatre face à lui. La vieille du troisième, l’aveugle du vingt-deux bis, mon poisson rouge et moi-même. Le bocal de verre s’est dispersé en mille éclats. Je n’ai pas trouvé les restes de Gambetta. Pauvre bête. J’espère qu’elle n’a pas eu mal. Souvenir du jour où le militaire d’en face s’est pendu parce qu’il n’en pouvait plus. J’ai alors donné son trentième nouveau nom au poisson. Je ne me souviens plus des anciens. En fait, je crois que je deviens fou. On peut d’ailleurs survivre tout en perdant la raison…

J’aurais aimé que la balle me fasse un troisième œil. Pour autant, aucun droit de se laisser aller. La règle du jeu est simple. Lui tire et nous essayons d’éviter la mort sans même nous défendre. Hier, peut-être. Aujourd’hui, les forces, la volonté sont parties. Les autres sont tous morts. Un par un, heure par heure, parfois en groupe. Le malheur est devenu une habitude et le feu a glissé sur le chant des oiseaux. Les choses ont commencé il y a bien longtemps. Très peu de souvenirs, trop jeune à l’époque.

Ma pauvre grand-mère, que Dieu ait son âme – car j’espère qu’il en resté quelque chose de cette âme après que son corps a été sublimé par une roquette en caoutchouc – ma grand-mère, disais-je, m’a souvent raconté l’arrivée du fou et de sa famille. Les gens chuchotaient qu’ils venaient d’un grand malheur, d’horribles souffrances. La rue les a acceptés. Certains les ont tout de même jetés ou à peine tolérés. Ce qui revient au même. D’autres hurlaient et parlaient de notre futur drame. Mais que nous importait, la rue était vaste et riche. Sa famille et lui avaient leur place. Et puis les balles ont commencé à tuer et à détruire. Ici et ailleurs, les gens ont dit qu’il était devenu fou et incontrôlable, que ses douleurs d’hier l’avaient à jamais marqué. Lui, du haut de son bunker criait son droit sur la rue. Elle était à lui ! Devait être à lui. Les siens sont partis ailleurs et l’ont laissé seul. Les vieux racontent que le scénario s’est alors partout répété, et voilà que chaque rue a aujourd’hui son tueur fou.

Je n’entends plus rien, peut-être va-t-il dormir un peu. Il sait combien nous sommes, avec ses jumelles à neutrons aucun de nos gestes ne lui échappe et quand il peut, quand il veut, il tue. Comme au début. A l’époque, les balles ont commencé par faucher ceux qui vivaient dans la rue sans y vivre. Les commerçants, les livreurs. Tous morts. Subitement, sans parfois s’en rendre compte. Et puis, ce fut le tour des gens d’ici. Il a fallu apprendre à vivre avec lui. A rester chez soi et à manger le cuir des fauteuils. A oublier l’école et à ramper comme le dernier des serpents. Toujours mettre murs entre soi et la façade de l’immeuble. Durant ces années, je n’ai rien appris d’autre que le bruit des explosifs et du plastic.

Bien sûr, les gens ont essayé de l’abattre mais rien à faire. Trop divisés, trop de vieilles haines qu’il a su si bien exploiter. Parfois, trop rarement, les sages d’ailleurs venaient nous voir. Ils écoutaient poliment notre terreur puis montaient le voir. Cris, menaces, disputes et cinéma. Ils repartaient en nous promettant que les choses allaient changer. Quelques jours de calme et le déluge reprenait. Même les pierres sont mortes, le cœur percé par des noyaux d’acier irradié.

L’aveugle est sorti. Costume blanc et cravate noire. Peut-être en a-t-il assez de ne pas voir dans une rue où l’on ne voit plus rien. La grenade au phosphore vient de lui sectionner le corps en quatre. Ses yeux roulent comme des billes de verre sur le trottoir rouge et sale. Je suis donc le dernier survivant. La vieille dame ne compte pas. Elle va mourir seule, impotente et muette. Je crois d’ailleurs que c’est pour cela qu’il n’a jamais essayé de la tuer. Elle ne pouvait parler ou écrire. La mémoire de la rue est importante, rien n’est plus dangereux que la mémoire. Je vais mourir bientôt. Nul endroit où aller, où se réfugier. Pas de nouvelle vie, de nouvelle rue.

A.B

jeudi

Paris Sportif Algérie : 25 ans d’existence !

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Le Quotidien d’Algérie, 16 octobre 1991

Fondé en 1966, le Pari sportif algérien a fêté lundi soir son vingt-cinquième anniversaire en offrant à ses travailleurs une soirée de gala organisée au cinéma Cosmos à Riadh el-Feth. C’est donc dans une ambiance très familiale et bon enfant que les chanteurs Hamidou et Chawli ont tour à tour offert un récital hawzi. La fête avait auparavant débuté par une allocution de bienvenue prononcée par Monsieur Hamid, co-administrateur du cinéma suivie par la suite par un petit speech prononcée par Monsieur Rezkane, mettant l’accent sur la constante hausse du chiffre d’affaires et ses implications quant à l’aide fournie au sport national. Ce petit discours a été suivi par une cérémonie de remise des médailles, la première du genre, aux employés les plus anciens. Médailles remises, entre autre, par M. Oussedik, Secrétaire général au ministère des sports et M. Brahim Djeffal, wali de Médéa. Une soirée bien sympathique en somme avec, en prime, un magnifique gâteau aux vingt-cinq bougies.

A.B 

mardi

Coopération Algéro-italienne : vers un partenariat durable

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Le Quotidien d’Algérie, 13 octobre 1991
 
De nombreux entretiens algéro-italiens ont eu lieu au cours de ces dernières semaines et cela à plusieurs niveaux politiques et économiques, témoin la récente rencontre à la Chambre nationale de commerce et le séminaire sur les Petites et moyennes industries (PMI) organisé à l’hôtel Aurassi. Il semble donc acquis que de grands projets de partenariat vont être développés entre les deux pays comme en témoigne l’entretien exclusif accordé par son Excellence l’ambassadeur d’Italie, monsieur Antonio Badini, au Quotidien d’Algérie. Une interview qui a débuté par un préambule résumant l’action actuelle du gouvernement italien dans le cadre du partenariat entre l’Algérie et l’Italie.

Le Quotidien d’Algérie.- Où en sont les relations entre l’Algérie et l’Italie ?
L’Ambassadeur Antonio Badini.- Nous souhaitons des relations stables, durables et saines. Nous sommes de grands acheteurs d’hydrocarbures algériens et nous savons que l’Algérie va dépendre de ses ventes de gaz et de pétrole pour les trois ou quatre prochaines années. Voilà pourquoi nous avons décidé d’orienter nos besoins sur l’Algérie. Nos achats vont donc augmenter, entraînant par la même occasion une plus forte dépendance énergétique vis-à-vis de votre pays. C’est là un risque calculé bien que la politique habituelle en matière d’énergie est basée sur la diversification des sources d’approvisionnements. Mais le constat est là, il n’est plus possible, si l’on veut que nos relations soient saines, de continuer à importer le gaz et à chercher à augmenter nos exportations. Notre démarche sera de favoriser la diversification de nos échanges à l’aide du partenariat. Nous sommes prêts à voir de quelle façon le marché italien pourrait être un débouché pour les produits algériens nés de la coopération entre nos deux pays. Prenons le cas de Fiat. Cette dernière s’engage sur des unités de composants pour une production qui dépassera les besoins internes du marché algérien. Il faudra absolument s’inscrire dans la stratégie de commerce mondial.

Quels sont les projets de partenariat en matière de PMI ?

A l’heure actuelle, il n’est pas encore possible d’énumérer des projets spécifiques, mais plutôt les catégories ou secteurs sur lesquels nous pensons mener une action pour que les petites et moyennes entreprises puissent être efficaces. Nous sommes en train d’étudier les possibilités de remise en marche de certaines usines qui souffrent de manque de matières premières ou de pièces de rechange. C’est le cas par exemple du textile. On pourra ainsi consacrer une ligne de crédit pour la réhabilitation de ce secteur.
Il y a une autre démarche qui consiste à favoriser l’installation de sociétés italiennes dans le cadre de partenariat. Nous avons un programme pour satisfaire les besoins des sociétés algériennes et redémarrer les PMI. Ce programme global comprendra les volets d’assistance technique, du choix du lieu d’achat de matières premières et de fournitures. Pour la première période, il s’agira d’un programme pilote de l’ordre de 30 à 40 millions de dollars. Ce sera un catalyseur pour d’autres actions similaires.

Le risque Algérie est-il calculé ?

C’est aux banques qui décideront d’intervenir sur le marché algérien de calculer le risque ainsi qu’aux sociétés d’assurance. Et il se fera sur la base de l’évolution du marché et de la régularité des paiements. Le rôle de l’Etat italien sera d’apprécier si le risque empêchera ou non le bon déroulement des opérations entre nos deux pays. L’Etat peut de ce fait influer directement les opérateurs en donnant des instructions pour que telle ou telle ligne de crédit soit assurée à 100%. Ce sont là des lignes de crédit qui seront garanties par l’Etat italien et son budget. De manière générale, le rôle de l’Etat sera d’empêcher que le calcul du « risque Algérie » se fasse au détriment de tout échange entre nos deux pays. Les obstacles pourront être contournés par les deux gouvernements à l’aide de schémas d’incitation qui restent à définir. L’Algérie pourrait prendre des mesures destinées à favoriser l’implantation de sociétés italiennes en révisant par exemple les lois douanières. Le rôle de l’Italie étant pour sa part de mettre en place un dispositif financier pour inciter les entreprises italiennes à s’installer en Algérie.

Jusqu’à présent, la phase est à la réflexion. Quelles sont les modalités pratiques de mise en place d’un tissu industriel dense et durable de partenaires ?

Il faut d’abord que soient bien évaluées les perspectives du marché maghrébin. On envisage un développement du Maghreb qui soit concerté. Il faut savoir quelle est la capacité de l’Algérie à s’imposer sur le marché maghrébin et il faut que l’entité maghrébine soit en mesure de soutenir la concurrence en Europe qui sera encore plus forte les prochaines années. Il faut donc que la production soit compétitive d’ores et déjà à l’échelle maghrébine. Aider âr conséquent l’édification du Maghreb est une condition sine qua none pour établir des relations durables entre l’Europe et le Maghreb. Et nous sommes, en tant qu’Italie, intéressés par le potentiel du marché que de perpétuer les relations vendeurs-acheteurs.
Nous sommes décidés à adopter une démarche à longue échéance qui consiste à investir et à développer le partenariat. Nous pensons que la PMI constituera pour le Maghreb et particulièrement la véritable force créatrice d’emplois et génératrice de revenus importants. C’est là la solution pour le problème de la démographie et du chômage.
Les potentiels humain et technologique existent. Il y a une infrastructure et une base matérielle qui sont prometteuses. Tout cela constitue une base solide à laquelle il manque une forme imaginative pour encourager le partenariat au sein des PMI.

L’Italie, est-elle en train de devenir le premier partenaire commercial de l’Algérie ?

C’est une ambition légitime que nous espérons réaliser. Et nous avons une stratégie bien établie. Nous avons pris nos décisions et nous pensons que l’Algérie est le pivot du Maghreb. Nous dépendons de l’énergie algérienne. Nous avons donc décidé de faire un grand programme d’investissement dans le secteur pétrolier mais il ne faut pas que nos relations commerciales se limitent aux hydrocarbures. Il nous faudra faire preuve d’imagination en offrant nos produits italiens de manière à combler le déséquilibre commercial entre nos deux pays. Dans ce sens d’idée, il n’y a aucune autre démarche possible que l’action de développer le partenariat. Notre problème aujourd’hui n’est pas d’augmenter nos exportations vers l’Algérie mais de rendre durables nos échanges commerciaux en sachant prendre des risques et c’est cela le partenariat. Mais il n’est pas question de brider l’Algérie par rapport à ses autres partenaires commerciaux.

N’y a-t-il pas un risque pour le Maghreb de devenir une simple arrière-base logistique de l’Europe de demain ?

C’est aux pays maghrébins de se défendre et d’analyser ce risque. Il faut bien sûr une division ou un partage équitable du travail. Nous ne pensons pas qu’il y ait un risque de voir l’Europe devenir l’unique partenaire du Maghreb. Par contre, un Maghreb sous-traitant des Douze (pays de l’Europe) est une possibilité à ne pas exclure. C’est à nous tous de travailler pour éviter que ce risque ne se concrétise. Je vous cite le cas de l’Italie qui à la fin de la Seconde Guerre mondiale était en grande partie détruite. Nous avons prospecté des sources de partenariat et c’est ainsi qu’on été obtenues plusieurs licences américaines de sociétés qui avaient compris que la seule façon de s’assurer un marché stable était d’y investir. Nous avons donc été sous-traitants des Etats-Unis pendant une quinzaine d’années mais passé ce délai, nous avons commencé petit à petit à améliorer notre production et à innover. Il faudra que le Maghreb en fasse autant. Qu’il obtienne en premier lieu une technologie et qu’il arrive un jour ou l’autre à créer de lui-même et à s’adapter au marché mondial. Ce risque existe donc mais il est préférable d’être un sous-traitant qu’un éternel acheteur et cela ne doit pas empêcher le pays qui sous-traite de penser à se développer encore plus en affinant sa production.

La motivation de l’Italie quant développement du partenariat avec l’Algérie n’est-elle pas aussi dictée par les problèmes de l’immigration ?

Nous avons parlé de sécurité pour justifier notre démarche. Sécurité économique, financière mais aussi interne. Créer des usines en Algérie à partir d’un partenariat voudra dire des emplois. Les gens pourront travailler dans leur pays et c’est ainsi que s’établiront des relations saines et durables. L’immigration est une source de tension et le partenariat est là pour résoudre à la racine ce problème en assurant un partage plus équitable des richesses. La pétrochimie ne suffit pas. La petite et moyenne entreprise est, je le répète, celle qui crée le véritable tissu industriel d’un pays et c’est ainsi que se créent les emplois. Aujourd’hui, vouloir augmenter ses exportations sans tenir compte de l’avenir des pays acheteurs, c’est ne pas voir à long terme et s’exposer à la création de tensions telles que celles engendrées par l’immigration.

Est-il vrai que l’Italie, cherchant à diversifier ses sources d’énergie électrique, désire développer en Tunisie un projet de centrale destinée à l’alimenter en électricité ?

Il est vrai que nous avons le projet de construire en Tunisie une centrale qui générerait de l’énergie électrique acheminée par un ‘électroduc’ vers l’Italie. Les contacts existent déjà entre nos deux pays mais il faut aussi que des contacts se fassent entre l’Algérie et la Tunisie. Nous espérons nous réunir le plus tôt autour d’une table pour finaliser la faisabilité de ce projet. Ce dernier améliorera peut-être les relations d’échange entre l’Algérie et la Tunisie. Il y aura ainsi le gaz algérien, l’électricité tunisienne mais cela de manière harmonieuse sur le plan maghrébin. C’est là une première qui pourrait précéder à la pose de nouveaux ‘électroducs’. Mais plus que tout, ce projet innove car il s’agira pour la première fois pour un pays d’Europe d’importer de l’énergie électrique à partir d’un pays du Sud de la Méditerranée.

Propos recueillis par Akram Belkaïd et Abdenour Moussi
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mercredi

Mosbah Halabi : Un Salman Rushdie druze ?

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Le Quotidien d’Algérie, 8 octobre 1991
 
Mosbah Halabi, écrivain druze, vient d’apprendre à ses dépens qu’il ne fait pas bon, en cette fin de siècle, de toucher d’un peu trop près à la religion surtout s’il s’agit d’écrits allant à contre-courant de l’ordre établi. L’affaire, sans atteindre la dimension de celle de Rushdie n’en n’a pas moins déclenché la fureur des chefs religieux druzes qui estiment que Halabi a révélé trop de secrets sur leur secte. Rappelons pour l’information que les Druzes sont issus d’un schisme de l’Islam qui s’apparente au chiisme mais dont on ne sait pas grand-chose à l’heure actuelle, les différentes générations ayant réussi le tour de force d’entourer leur culte d’un voile épais et impénétrable par les non-initiés.

L’objet des foudres religieuses est un roman consacré à la vie de tous les jours d’une jeune fille de dix sept ans et intitulé tout simplement « Journal d’une jeune fille druze ». Dès sa première parution des autodafés ont été organisés obligeant l’auteur à retirer de la vente puis à détruire lui-même l’ensemble des exemplaires tirés. Un geste qui n’aura pas suffi puisque Halabi a été déclaré apostat et officiellement banni. Ce n’est pas la première fois qu’une telle mésaventure arrive à ce journaliste de 47 ans. Il avait ainsi provoqué un véritable tollé en 1973 en révélant que les Druzes croient à la réincarnation, chose qui, à l’époque, n’était pas encore connue.

Belkaïd Akram
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Vu : 52 sur la Une (TF1)

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Le Quotidien d’Algérie, 6 octobre 1991.

Où l’on a encore reparlé des Juifs, de la Seconde Guerre Mondiale et de l’antisémitisme. Le parabolé a regardé, suivi, absorbé l’émission. Beaucoup d’informations, nouveau vocabulaire, nouveaux concepts. Ainsi antisioniste se résume désormais à être anti-juif. Parler de lobby juif est aussi un acte antisémite et la conclusion de tout ce verbiage est que l’antisémitisme n’est ni plus ni moins que le fait d’être anti-juif. Oubliés les Arabes qui bien que sémites n’ont pas eu droit de cité ou si peu. D’après-vous qui est mieux placée qu’une Israélienne de Jérusalem pour parler en toute objectivité de « l’antisémitisme des Arabes » ?

Manipulations, montages grossiers constituent le gros du documentaire. Ainsi a été donnée la parole à une kyrielle de tarés en tous genres : néo-nazis américains, révisionnistes français, autant de sombres gus dont on veut nous faire croire qu’ils sont légion aujourd’hui.

Quelle lourde menace pour l’avenir qu’un prêtre nazi de Chicago ! Tout le monde y passe. L’Europe, l’Eglise catholique, le Japon ( !) et même les USA. Il paraît d’ailleurs que les futurs massacres de juifs auront lieu dans ce pays où les Noirs sont de plus en plus musulmans et… fanatiques. Une énormité à laquelle personne ne peut répondre de manière décente. Décevant spectacle d’une télévision dont on se demande ce qu’elle a cherché à prouver. A moins qu’elle n’ait voulu ressembler à ces horribles documents de propagande nazie dont l’émission a finalement fini par emprunter les techniques.

Akram Belkaïd
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vendredi

Bibliothèque Nationale : L’Alarme ! Entretien avec M Badjadja

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Le Quotidien d’Algérie, 3 octobre 1991

La BN a mal, très mal. Une visite sur les lieux et un entretien en toute transparence avec le nouveau directeur, M. Badjaja, ont mis à jour une situation bien triste, voire même scandaleuse, en un lieu qui se devrait d’être le fleuron de la culture nationale.

Le Quotidien d’Algérie : Vous venez d’être nommé depuis peu à la tête de la bibliothèque nationale mais peut-on avoir une idée de sa situation générale ?

M. Badjaja : Pour être franc et direct, je dirai que la BN va très mal et souffre de nombreux problèmes qui à terme risquent de la réduire à néant et cela dans tous les sens du terme. Le premier (problème) concerne l’état des manuscrits et des livres imprimés anciens dont certains datent de plusieurs siècles. Ces derniers sont attaqués par des parasites et ont beaucoup souffert des conditions d’archivage et de stockage. L’état des locaux et des équipements constitue le second problème et il est vraiment de taille.

Le bâtiment de la Bibliothèque nationale est totalement vétuste. Il faut refaire les réseaux électriques, la plomberie et le revêtement du sol. Les équipements essentiels tels que la climatisation et le chauffage sont en panne. Même la détection incendie ne fonctionne pas ce qui pour une bibliothèque est quand même intolérable. En fait cette défection d’équipements influe directement sur la conservation des livres. Comment voulez-vous que les manuscrits soient en bon état quand l’humidité sévit ?
D’autres équipements qui sont en panne jouent sur les conditions de travail. Je citerai les monte-charges et les ascenseurs sans lesquels nous ne pouvons pas stocker les livres sans oublier le système pneumatique qui achemine la demande des lecteurs et qui améliore la convivialité de la Bibliothèque.

Q.A : C’est là un constat des plus négatifs !

M. Badjaja : Ce n’est pas tout. Il y a au niveau du garage, c'est-à-dire un local qui n’a rien à voir avec le magasin, des milliers de livres entassés à même le sol dans un désordre incroyable. La majorité du stock est constitué par des livres de la lecture publique qui étaient à l’époque un système de bus itinérants destinés à favoriser la lecture dans les villes et villages. Les bus ont été réformés et les livres jetés dans ce véritable dépotoir. J’ajoute que nous y avons trouvé des livres anciens de toutes dates. La bibliothèque nationale a un problème de stockage. Sur dix-huit niveaux d’entreposage, nous en avons quatre qui n’ont jamais pu être utilisés pour la simple et bonne raison que les dalles n’ont jamais été coulées. Nous avons donc un trou béant dans notre sous-sol avec en prime des infiltrations d’eau et des dépôts de calcaire. La BN a une véritable grotte merveilleuse avec ses stalagmites et ses stalactites !


« La BN est sale ! »


Q. A : Pourtant l’activité continue ?

M. Badjaja : Oui, mais dans quelles conditions ? Notre salle de lecture est vétuste et insuffisante. Le plus grave est que la BN a dévié de sa mission. C’est devenu une simple annexe de la Bibliothèque universitaire. Les salles de lecture sont devenues des salles de révision de cours et les chercheurs qui devraient être nos principaux clients ne viennent plus. Je n’oublie pas la situation sociale des travailleurs que je résumerai en disant qu’en trente ans il n’y a eu que deux logements attribués au personnel. Voilà la solution et pour terminer je dirai aussi que notre Bibliothèque est sale et manque totalement d’hygiène car elle est devenue le paradis de la poussière, des cafards et autres insectes.

Q.A : La situation est vraiment catastrophique…

M. Badjadja : Tout à fait et c’est pour cela qu’il est temps pour nous tous de réagir et nous avons un programme de travail qui touche en premier lieu à la rénovation du bâtiment. En 1985, la BN avait bénéficié d’une enveloppe de trois milliards de centimes pour la rénovation des locaux. Cette enveloppe n’a jamais été touchée pour des éternelles questions de bureaucratie. Mais, cette année, nous avons décidé d’entamer ce crédit. L’OFARES (Office d’Aménagement et de restructuration de la Zone du Hamma) a été saisi pour prendre en charge l’étude pour la remise en état du bâtiment. Une première expertise a été remise comprenant une évaluation globale ainsi que des propositions de service. Le plan d’action se divise en trois étapes.

La première concerne les choses urgentes qui ne nécessitent pas des études préalables trop poussées. Je cite par exemple, le revêtement du sol, l’ensemble de la plomberie et du réseau sanitaire ainsi que tout ce qui touche à l’assainissement et à l’hygiène. Nous allons aussi réaménager certains espaces en essayant, par exemple, de regrouper l’administration et je n’oublie pas l’aménagement d’aires à caractère social pour les travailleurs à savoir une cafétéria et une cantine.

La deuxième phase dépendra d’études un peu plus importantes car elle concerne la remise en marche et la modernisation d’équipements tels que les ascenseurs et les monte-charges. Je signale, d’autre part, que nous avons déjà engagé la réforme du vieux matériel qui encombre nos locaux et qui ne sert strictement à rien. Ces deux étapes seront finalisées avant la fin de l’année 1992.

Par contre, la troisième ne pourra, quant à elle, être lancée qu’à partir de 1993 car elle englobe tous les grands travaux dont l’aménagement du sous-sol et de sa grande cave en aires de stockage assainies et propres, la remise en marche de la climatisation, de la détection incendie, la modification de la salle de lecture avec la construction d’un second niveau destiné aux chercheurs.


« La bibliothèque du Hamma est un projet grandiose »

Q.A : Il ne servira à rien de rénover le bâtiment si la BN reste désorganisée

M. Badjadja : C’est une évidence. Pour le fonctionnement, nous avons mis en place un comité qui regroupe tous les cadres scientifiques et techniques afin d’associer ces derniers à la prise de décision. La gestion de la BN ne sera pas de son ressort mais plutôt l’examen des divers problèmes et la mise en place de solutions. Nous avons déjà commencé à travailler sur des axes tels que l’organigramme, le règlement interne, le plan de formation du personnel et même le statut juridique de la BN. Ce comité prendra aussi en charge la politique d’acquisition de livres pour la future bibliothèque du Hamma ainsi que l’organisation des manifestations culturelles sans oublier la gestion du patrimoine.

Q.A : Où en est exactement le projet du Hamma ?

M. Badjadja
: La bibliothèque du Hamma est un projet grandiose et je note que malgré la crise qui sévit dans le pays et la rareté en devises, l’Etat nous alloue l’équivalent en devises de cinq milliards de centimes pour acheter des livres à l’étranger pour ce bâtiment qui sera inauguré en juillet 1992.

Q.A : Quel sera son statut ?

M. Badjadja : Le statut de la bibliothèque du Hamma n’a rien de définitif car rien n’a été décidé, mais nous avons déjà commencé à étudier son côté organisation sans tenir compte du côté juridique. Il y aura ainsi plusieurs niveaux de la lecture dont une bibliothèque pour la jeunesse, une autre pour le prêt, une bibliothèque de lecture publique sur place en accès libre de rayonnage et une bibliothèque de conservation. Je tiens à dire que tout le monde souhaite que la BN gère le tout, c’est-à-dire que l’actuelle structure actuelle s’installe au Hamma. Le bâtiment dans lequel nous sommes peut-être transféré vers une autre tutelle, régionale par exemple, mais il faut que cela reste une bibliothèque.

Q.A : Quels sont vos rapports avec les éditeurs ?

M. Badjadja
: Nous avons avec eux des relations traditionnelles et même réglementaires. Il sont tenus par la loi du dépôt légal de déposer cinq exemplaires de leur production et cela s’applique à tout le monde. Qu’il s’agisse de livres, de cartes postales, de posters ou même de journaux. C’est d’ailleurs dans l’intérêt de l’éditeur car il s’agit pour lui d’une protection qui lui permettra d’attester de ses droits à tout instant et en toute situation. Mais la plupart des éditeurs du livre ne respectent pas cette réglementation bien que certains nous envoient de manière systématique cinq exemplaires à chaque parution. Même en ce qui concerne la presse, nous constatons que certains titres ne nous envoient jamais ou alors de manière irrégulière les dix exemplaires exigés par la loi. D’autres jouent le jeu dont par exemple El Moudjahid, Echaab et le Quotidien d’Algérie.

Q.A : Vous lancez une opération sauvetage des manuscrits de la Bibliothèque nationale en faisant appel aux éditeurs mais pensez-vous que l’affaire soit intéressante pour eux au point de vue financier ?

M. Badjadja : La BN ne déboursera aucun centime, nous l’avons clairement expliqué aux éditeurs. Nous mettons à leur disposition des manuscrits dont on souhaite faire le maximum de copies avant que l’original ne soit totalement détruit. Nos exigences sont minimes bien que nous soyons détenteurs du document. Nous demandons donc que l’indication ‘Bibliothèque Nationale’ soit portée sur la couverture et qu’un quota du tirage nous soit remis. Pour nous, l’opération est culturelle car elle a pour but de diffuser ces manuscrits à large échelle et à pouvoir faire face à la grande demande des bibliothèques arabes et occidentales qui ne cessent de nous contacter pour avoir la possibilité de consulter tel ou tel ouvrage. Des demandes que nous ne pouvons honorer car, à terme, cela détruirait le manuscrit original. D’où cette idée de faire des copies. J’ajouterai aussi que l’éditeur ne doit pas être simplement qu’un commerçant mais agir parfois dans le sens culturel.

Q.A : Et si cette opération échouait ?

M. Badjadja
: Nous serons hélas obligés de nous tourner vers les éditeurs arabes et occidentaux ou d’envisager de débloquer nous-mêmes un budget pour cette opération.

Q.A : Avez-vous beaucoup de dons de manuscrits ?

M. Badjadja : Notre fonction est de préserver la quintessence de la production de l’esprit, c’est-à-dire toutes les œuvres de création. Les documents administratifs étant du domaine du centre des archives. Nous avons, par exemple, les manuscrits de Jean Sénac qu’il a légués à la BN par testament. Nous espérons que les artistes algériens qui sont aujourd’hui célèbres, en feront de même.

Q.A : Votre programme de ‘survie’ est très ambitieux mais avez-vous du personnel pour cela ?

M. Badjadja : La BN souffre de l’insuffisance de l’encadrement technique et scientifique, pour un établissement de cette importance ! Le département administratif est saturé mais nous n’avons que quatre conservateurs et douze attachés de recherche et c’est trop peu pour gérer la bibliothèque.

Entretien réalisé par Belkaïd Akram
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Zaïre : Mobutu compose

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Le Quotidien d’Algérie, 3 octobre 1991

Une semaine après les émeutes qui ont secoué Kinshasa, la situation politique au Zaïre est loin d’être rassurante car elle s’inscrit dans le schéma désormais classique qui relie les régimes totalitaires à parti unique et les explosions populaires. Dans ce type de scénario, le président est toujours obligé de manœuvrer afin de préserver son pouvoir. Les astuces sont nombreuses qui consistent par exemple à proclamer le multipartisme ou à décréter la démocratie. Mais la manœuvre la plus savante est celle de nommer une personnalité de l’opposition au poste de Premier ministre et d’essayer par là même de focaliser l’attention du peuple sur lui.

Il semble que c’est la stratégie adoptée par le président Mobutu, stratégie qui pourrait tout de même s’avérer ne pas être payante car si ce dernier semble enfin avoir repris le contrôle de ses troupes – qui ont largement contribué au pillage de la capitale, il n’en demeure pas moins que sa position devient plus inconfortable. La nomination d’Étienne Tshisekedi, président de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) et considéré comme étant l’un des plus durs adversaires du maréchal, est la première grande concession apportée par ce dernier à l’opposition depuis l’instauration du multipartisme au Zaïre. Ce geste, ajouté au limogeage du chef de l’état-major des armées, pourtant proche de Mobutu, ne devrait pas suffire à lui sauver la mise. Une économie exsangue, des richesses pillées par les multinationales, une capitale dévastée et, surtout, un mécontentement général de la population, sont autant de points d’ombre qui risquent de faire échec à la stratégie du président.

Le problème est clair. Il faut à tout prix que le gouvernement d’Étienne Tshisekedi soit en place avant toutes nouvelles émeutes. La cherté de la vie, l’inflation galopante peuvent prendre de vitesse le maréchal Mobutu, de même que le fait que la constitution du gouvernement risque d’être longue car si l’investiture du nouveau premier ministre devant les députés du parti unique ne devrait pas poser trop de problèmes, il pourrait en être autrement concernant la nomination des ministres avec tout ce que cela peut provoquer comme luttes de clans et d’influences. Une course contre la montre avec un lourd handicap pour un homme qui a régné sans partage sur le Zaïre depuis près de vingt-cinq ans.

Belkaïd Akram
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jeudi

Prost ou l’éternelle tchaklala

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Le Quotidien d’Algérie, 3 octobre 1991

Les grands champions ne laissent jamais indifférents et Alain Prost fait partie de cette catégorie de sportifs qui par un geste ou une phrase déchaînent les passions des foules et des médias. La différence entre les uns et les autres est que certains le font de manière réfléchie et raisonnée, n’entamant des polémiques que lorsque le remue-ménage médiatique en vaut la peine. Force est de constater que Prost est loin d’être un ange ce qui, hélas, enlève beaucoup à son prestige. Un rapide coup d’œil en arrière suffit à le prouver. Polémiques hyper-médiatisées avec Berger, Mansell et Senna. Ou alors véritables affrontements franco-brésiliens entre lui et Senna.

En fait, Prost n’a jamais tort. S’il gagne, c’est à lui seul qu’il le doit. S’il perd, c’est de la faute à la pluie, au pilote d’une autre voiture qui l’aurait délibérément accroché, sans oublier la voiture ou les pneumatiques. Après le Grand prix d’Espagne, l’ex-champion du monde a justifié sa défaite par le fait que Ferrari lui avait imposé une gamme particulière de pneus. « La faute à l’autre » alors que Mansell, vainqueur à plus de quinze secondes, ne pipait mot, blasé par les écarts du Français. L’on se souvient aussi de ce drame italien où Prost avait exigé le départ du directeur technique de Ferrari arguant du fait que ce dernier était responsable de ses échecs successifs. Scandalissimo !

L’homme est parti mais Prost n’a toujours pas gagné de Grand prix depuis plus d’une année. Mauvaise voiture, moteur trop fragile sont des excuses généralement avancées. En somme, la stratégie des pleurs. Même la presse française, hier si fier de son champion, ne s’y est pas trompée et l’on note de plus en plus d’agacement dans le compte-rendu de déclarations et l’on ne prend plus les paroles de Prost pour argent comptant. Alexeï, son coéquipier chez Ferrari et grand espoir de la F1 française perd aussi son calme en déclarant publiquement souhaiter son départ de l’écurie italienne.
Il est ainsi des champions qui aiment gagner et savent perdre. Et d’autres qui, au contraire, par leur trop plein d’orgueil, n’ont pas la manière de perdre ni même celle de gagner.

Belkaïd Akram
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vendredi

Que sera le nouvel ordre international ?

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Le Quotidien d’Algérie, 30 septembre 1991 

La guerre du Golfe a introduit dans le champ politique international un concept appelé « nouvel ordre international ». L’expression est aujourd’hui reprise de manière quasi-permanente par les médias pour qualifier toute nouvelle action de l’Amérique. Pourtant, il n’en demeure pas moins que l’idée reste totalement floue car n’ayant pas été définie de manière explicite. En fait, quatre récents événements préfigurent déjà de ce que risque d’être cet ordre mondial conçu puis géré par les Etats-Unis.

La destruction unilatérale des armements nucléaires décidées par la Maison-Blanche prouve que cette dernière considère qu’elle n’a plus rien à craindre de l’Union soviétique et qu’une guerre atomique n’est plus du domaine du possible. L’Amérique considère donc désormais qu’elle est en pôle position et que nul autre pays ne peut interférer dans sa politique internationale. D’autre part, il est évident que la gestion d’une planète est une tâche gigantesque pour un pays où une ville comme New York échappe à tout contrôle. L’administration Bush va donc surveiller les régions dites stratégiques et vitales pour sa propre économie en n’hésitant pas à y intervenir directement.

Les autres zones de tensions régionales seraient ni plus ni moins délaissées. Ainsi, la guerre civile, car s’en est une, qui sévit en Yougoslavie ne semble pas émouvoir Washington qui, pour se donner une contenance, se réfugie derrière le principe de la souveraineté nationale. La vérité en fait est que le conflit yougoslave ne met aucun intérêt US en péril et la comparaison avec l’invasion du Koweït n’est même pas de mise. Le Sahara occidental est le troisième point qui prouve à souhait que l’Amérique se désengagera des conflits régionaux non-stratégiques. Ainsi, le président Bush souhaite seulement que le processus de paix se concrétise sans pour autant que le Maroc ne soit rappelé à l’ordre en raison de ses multiples dépassements dont l’organisation d’une nouvelle marche verte.

Il apparaît de manière claire que le nouvel ordre international sera un ordre US mais surtout un ordre à deux vitesses. Le problème palestinien, quatrième événement majeur et la future conférence de paix, risquent d’être le test de vérité sur les véritables intentions des Etats-Unis qui, pour reprendre la phrase de Yasser Arafat, « engagent toute leur crédibilité ». Ces derniers ne peuvent donc plus se dérober sans mettre à mal leur nouveau concept des relations mondiales.

Belkaïd Akram
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